DUFRAL Diplôme Universitaire francophone d'Allergologie
Le pari était osé, et lorsque j’ai présenté pour la première fois le projet en 2008, j’ai rencontré plus de scepticisme que d’enthousiasme.
- Pourquoi enseigner cette discipline alors que les priorités en Afrique sont représentées par la tuberculose, le paludisme et le SIDA ?
- Est-on certain qu’il y aura des médecins intéressés ?
- Et puis cette méthode de déplacer les enseignants plutôt que les étudiants n’est pas conforme à la tradition jacobine française !
Mais quand il y a une volonté, il y a un chemin. J’ai été aidé et soutenu par quelques amis français et francophones de l’ANAFORCAL et j’ai obtenu un avis favorable des universités Paul SABATIER de Toulouse et Claude BERNARD de Lyon grâce à l’entremise des enseignants d’allergologie de ces villes, à savoir mes amis les professeurs Alain DIDIER et Jean-François NICOLAS.
Il a fallu également trouver un financement qui a été obtenu par le soutien sans faille de l’ANAFORCAL puis de la FAI.
Ces dix années ont représenté beaucoup d’énergie et de travail pour préparer les cours et les évaluations en ligne, assurer la logistique des séminaires pratiques annuels en Afrique et faire passer les examens.
Je tiens à remercier ici tous les enseignants bénévoles qui ont participé à cette aventure et les équipes des ANAFORCAL Afrique et Maghreb qui nous ont reçus. Au-delà du challenge éducatif et médical, ce fût une magnifique aventure humaine, riche de rencontres, de découvertes, d’amitiés nouées et d’imprévus.
Et puis, il y a l’Afrique, continent magique, envoutant, intact, qui regorge de potentialités et de richesses culturelles et humaines et dont le sens de l’hospitalité de ses habitants est à nul autre pareil. Ce n’est pas fortuit si cette terre a été choisie pour être le berceau de l’humanité…
Dieu ou le hasard ont eu bon goût !
Jean Pol DUMUR
LA NAISSANCE
Avant 2008, il y avait très peu de médecins africains formés à l’allergologie, à l’exception de quelques rares confrères qui s’étaient initiés à la discipline dans les services français. J’avais été élu en juin 1993 président de l’Association Nationale de Formation Continue en Allergologie : ANAFORCAL, qui regroupait une trentaine d’associations régionales françaises de métropole.
Dès mon élection, j’ai décidé d’ouvrir l’association aux médecins francophones hors de l’hexagone avec la création de la section des Antilles et du Maroc en 1993 puis de l’Océan Indien en 1995 avant que nous rejoignent dans les années suivantes la Belgique, l’Algérie, la Tunisie puis le Sénégal en 2007, première association continentale africaine. Depuis 2001, nous organisions chaque année les Rencontres Francophones d’Allergologie (RFA) qui réunissaient sur quatre jours, généralement en octobre, tous les allergologues de l’ANAFORCAL. Initiées à FES en 2001, les RFA se sont déroulées secondairement à l’Ile Maurice, à Bruxelles, en Guadeloupe, à Marrakech et à la Réunion avant de se réunir pour la première fois en Afrique continentale à Dakar en octobre 2008. A cette occasion, nous avions invité une douzaine de médecins de dix pays francophones d’Afrique intéressés par l’allergologie venant du Sénégal, de Côte d’Ivoire, du Cameroun, du Togo, du Niger, du Mali, de Guinée, de Mauritanie ou du Bénin. Lors d’un repas, je leur ai demandé ce qu’ils attendaient de l’ANAFORCAL. Ils m’ont répondu en chœur : nous former à l’allergologie !
Comment dire non devant une telle enthousiaste unanimité ? Néanmoins, les obstacles étaient nombreux pour des raisons évidentes de coût et de complications administratives. Cette période voyant fleurir les formations à distance via Internet, j’ai eu l’idée d’imaginer un concept qui soit réalisable sur le plan matériel et financier tout en conservant une qualité irréprochable d’enseignement, ce qui imposait inexorablement un temps minimal de formation pratique au contact de malades. Il a fallu également trouver une université française qui soit partante pour créer ce type de formation diplômante. Ayant des rapports amicaux anciens avec Alain DIDIER, professeur de pneumologie et allergologie au CHU de Toulouse, je lui ai présenté le projet qui l’a séduit.
Il a fallu ensuite obtenir l’aval du conseil pédagogique de l’université Paul SABATIER de Toulouse qui a donné son accord grâce au soutien de mon ami Elie SERRANO, professeur d’ORL et vice-doyen.
Pour permettre une totale indépendance du Diplôme Universitaire Francophone d’Allergologie par rapport aux autres structures de formation, nous avons créé l’association pour le DUFRAL qui aurait la responsabilité logistique et financière du diplôme. Grâce à l’aide de l’ANAFORCAL puis de la FAI, nous avons pu dégager un budget pour démarrer l’enseignement.
EPILOGUE
le DUFRAL s’est progressivement imposé dans le paysage de l’enseignement de l’allergologie au sein de l’espace francophone et est devenu incontournable au fil des ans. Il a permis à de nombreux médecins du continent frère africain de se former dans les meilleures conditions matérielles et éducatives, ce qu’ils n'auraient sans doute pas pu faire dans d’autres circonstances. Il a constitué pour ces confrères une indéniable opportunité d’enrichissement de leurs connaissances et d’amélioration de leur pratique médicale. En outre, il a permis une meilleure prise en charge des populations locales souffrant d’allergie.
Au-delà de cette valeur ajoutée, le DUFRAL est fondé sur un concept original et novateur : enseignement théorique en ligne, regroupement des étudiants et des enseignants dans un même lieu pour la pratique, prise en charge des patients avec les moyens mis à disposition par les structures hospitalières locales. Cette approche a pour avantage d’arrimer l’enseignement à la réalité du terrain. Cet enseignement a également un effet positif inattendu, à savoir de favoriser la rencontre de médecins africains de différents pays alors qu’ils ne se fréquentaient que très peu auparavant,chacun restant souvent cloisonné dans son territoire. Ces échanges sud-sud permettent une coopération plus active entre confrères exerçant la même discipline.
Enfin, en dehors de son intérêt pédagogique et médical, le DUFRAL constitue une merveilleuse aventure humaine. En ces temps de repli sur soi, de nationalisme, de refus de l’autre, du différent voire de xénophobie, il représente un exemple vertueux de coopération nord-sud fondée sur le respect, la tolérance, la fraternité et l’échange.
Longue vie au DUFRAL
Jean Pol DUMUR